Description du projet
Création 2004
Une double création
Depuis deux ans, Karine Saporta travaille sur le Natya Sastra, traité fondateurdes grands styles classiques de la danse et du théâtre indien. Au cours de ses différents voyages, explorant la relation qu’entretiennent aujourd’hui les grands maîtres de la danse indienne avec ce traité, elle a visité les grandes écoles de danse de toutes les régions de l’Inde.
De cette recherche, un projet de création est né, il se présente et se développe sous la forme de trois volets.
Premier volet : « La Force de l’Ame I» Fin novembre 2003
La chorégraphe s’est rendue en Inde pour créer une pièce en forme d’essai sur la non-violence qui fut présentée le 29 décembre 2003 au festival de la fondation Darpana à Ahmedabad. En effet, le public Indien porte un grand intérêt à la démarche entreprise par Karine Saporta, séduit par le style de la chorégraphe française lors de la tournée qu’elle a effectuée dans tout le pays avec sa compagnie quelques mois auparavant. Celle-ci a fait d’ailleurs l’objet d’un documentaire réalisé par Natacha Defontaine : « D’une Inde à l’autre ». A l’occasion de la création à la Fondation Darpana, le film aborde le travail de recherche et de réflexion de Karine Saporta sur la danse indienne et sa transmission. Il reflète aussi le point de vue particulier de la chorégraphe sur l’Inde et la relation qu’entretient aujourd’hui le sous-continent avec le monde contemporain occidental.
Deuxième volet : ” La Force de l’Ame II ”
Sous- titrée “Wrappings” met en scène des artistes indiens sélectionnés au cours d’un repérage méthodique qui a amené la chorégraphe à rencontrer plus de 700 danseurs et musiciens mais aussi des artistes espagnols flamenco et des danseurs contemporains français.
Cette création chorégraphique et musicale créée au Théâtre de Caen le 2 Juin 2004 met en lumière les liens profonds existant entre la danse classique du Nord de l’Inde le Khathak et le Flamenco.
Par les frappes de pied et les mouvements de bras ondulants, les deux styles se ressemblent étrangement. En effet, venus du Nord de l’Inde jusqu’en Andalousie, les Roms ont amené en Europe leur culture métissée d’influences indienne et perse.
Pourtant l’on peut remarquer que les pirouettes éblouissantes du Kathak, réminiscences du mouvement des derviches tourneurs, ont été éliminées de la danse gitane. Quelques historiens de la danse classique indienne se demandent aujourd’hui si l’influence perse, à l’oeuvre depuis des siècles dans la danse Kathak ne seraient pas reconnaissables dans notre danse classique occidentale. L’aspiration à la légèreté, la fluidité, et le dessin des bras, les girations vertigineuses, sont en effet très semblables dans les Kathak et la danse classique européenne.
” Wrappings ”
Dans un univers de chantier, de sites en démolition, se rencontrent des êtres à la chair fragmentée, striés de culture perse, indienne, rom…andalouse.
Transmetteurs-émetteurs, les danseurs de ” La Force de l’Ame II ” (Wrappings) ” captent et travaillent les ondes surgies de la tradition pour émettre un nouveau spectre vibratoire. Comme pour exposer le perpétuel recouvrement des strates de leurs origines, ils se couvrent et se recouvrent… Ils s’emballent littéralement dans d’immenses plastiques et dans de très légers nuages de plâtre. L’on pense au travail dans les arts plastiques d’un Christo ou d’un Boltanski.
La musique est tour à tour archaïque, classique ou électrique. Guitares, tablas jouent d’ivresse et la perte de mémoire.
LE VOCABULAIRE CHORÉRAPHIQUE
Une longue recherche historique sur la danse indienne a mené Karine Saporta à s’intéresser à un traité de danse qui remonterait à 300 ans avant JC, le Natya sastra, et à étudier plus particulièrement la danse kathak qui a pris sa source dans cette région du nord de l’Inde.
Le Kathak est l’une des six danses classiques de l’Inde. Le mot kathak signifie en sanscrit “histoire, conte”. À la base théâtre dansé mimant les récits épiques et sacrés, c’était alors un art purement religieux, comme la plupart des danses hindoues.
C’est l’arrivée des Moghols en Inde au XVIe siècle qui marqua l’évolution de la danse sacrée vers une danse de Cour. En effet, fort apprécié des nouveaux conquérants, le Kathak connut un essor prodigieux et devint un art classique à part entière. Les influences musulmanes, persanes, se sont mêlées aux origines hindoues pour aboutir à un style raffiné et très rythmé dans lequel la dimension narrative et théâtrale a perdu de son importance.
C’est le travail des pieds qui frappe le plus dans le spectacle de kathak, ainsi que les pirouettes impressionnantes de rapidité s’achevant sur des poses momentanément figées et dignes de la statuaire indienne. Mais, comme dans la plupart des autres formes de danse classique indienne, le jeu des expressions du visage ou les gestes symboliques, ou mûdras, ne sont pas absents (même s’ils occupent une place moins importante que dans le bhârata-natyam par exemple).
Souvenez-vous les scènes inoubliables de danse dans le Salon de musique du cinéaste Satyajit Ray ! A Ahmedabad, se cachent des palais et des demeures très appréciés du cinéaste, comme du monde de l’art et de la mode indiens, en général qui contiennent de tels salons de musique.
Karine Saporta s’inspirera pour cette dernière création du Natya Sastra en cherchant à traduire à travers un vocabulaire chorégraphique délibérément contemporain, les indications techniques et sémantiques de ce fameux traité.
Par l’intermédiaire de la gestuelle qui est la sienne, Karine Saporta intégrera aussi dans sa création le travail rythmique (frappe de pied) et musical aussi riche que complexe de la danse indienne.
En travaillant sur l’histoire de la danse indienne et en se basant sur le fait que vraisemblablement le peuple “rom” serait parti du Nord-Ouest de l’Inde pour l’Europe et l’Espagne en particulier, en emmenant les gestes et les rythmes kathak, Karine Saporta, entend bien faire un travail sur les fondements musicaux rythmiques du flamenco. Car on retrouve dans le flamenco comme dans la danse Kathak, la même posture du corps qui donne toute sa liberté au travail des pieds.
C’est d’ailleurs sa quête des origines du flamenco qui l’ont amené à explorer le style des musiques et des danses du Nord de l’Inde. L’esthétique générale de la création ne s’inspirera pas du contenu mythologique de danses indiennes mais plutôt de l’esprit mathématique qui paradoxalement, selon Karine Saporta, confère sa spiritualité et sa pureté à la danse indienne.
Plutôt que de travailler uniquement avec des danseurs contemporains sur la thématique de l’Inde, il a semblé intéressant à la chorégraphe de choisir des danseurs indiens ayant une parfaite maîtrise technique de la gestuelle et des rythmes, tout en étant extrêmement curieux et ouverts vis-à-vis d’une démarche orientée vers la recherche.
À travers ce travail de création, Karine Saporta, veut tendre vers une ascèse esthétique, se démarquant d’une démarche plus flamboyante présente dans ces créations sur le flamenco ou la danse baroque par exemple. Ici la chorégraphe veut explorer les teintes séparant le noir et le blanc et n’introduire que très parcimonieusement l’esthétique indienne dominée par des couleurs vives.
LES PARTENAIRES INSTITUTIONNELS
Création de Karine Saporta soutenue par :
_ L’Ambassade de France en Inde.
_ L’AFAA
_ Le Conseil Régional de Basse-Normandie
_ La DRAC de Basse-Normandie
_ Le Centre Chorégraphique National de Caen.
Coproductions :
« La Force de l’Ame I » : Fondation Darpana dirigée par Mallika Sarabhai
« La Force de l’Ame II » : Scène Nationale de Fort de France (Martinique)
La Force de l’Âme I et II