DINO FAVA

EXPOSITION “ENCORE”

Encore quoi, encore le désir de continuer une pratique artistique.  La vie la met à l’épreuve et j’ai à la fois ce désir et cette même volonté. Je peins depuis environ quarante années et  suis pleinement impliqué dans une pratique artistique depuis plus longtemps. Le monde change et rien n’est jamais acquis. Se renouveler dans le sens de rebondir encore peindre, écrire, définir des relations à l’existence à travers de multiples expérimentations et en restituer un rapport aux choses d’abord sur surface plane, colorée. Avec « Encore » je fais un pari sur le futur.

Peinture: suites distinctes

Parmi l’apparence de désordre et la profusion de l’atelier, j’ai repéré cinq séries de peintures.  Élaborées au fil du temps elles se situent encore au centre de ma pratique.

Elles engagent des rapports différents à la forme, selon des procédures souvent précises pour finir en peinture ou quelque fois en sculpture ou en photographie.

De cette sorte de panorama qui correspondrait à des aspects bien définis de la vie de ma peinture, je suis allé dans les lieux où je conserve mes réalisations considérées comme terminées et j’ai extrait  quatre Peintures-Tigres, huit Monde Figure Peinture, huit Cosmographies, quatre Figure Ovoïdes, quatre Océaniques et cela donne bien cinq suites où la peinture se met en question de façon différente. L’exposition en virtuel ou dans un espace plus physique pourrait être un regard condensé sur  une partie importante de ce que je réalise au fil des années  et dans un espace plus physique de type galerie classique j’envisagerais de recréer une véritable ambiance de mon atelier. J’y présenterais aussi un ou deux livres texte/peinture.

Je ne fais que faire se succéder les moments de pratique et alors des choses aboutissent sur les toiles ou autres supports et espaces.

Thème

Les thèmes s’entrecroisent. Multiplier les expérimentations disait le très célèbre Frédéric Nietzsche.  La thématique devient la pratique elle-même. A travers elle, le lieu où les  outils s’inventent,  le cheminement,  et les choix de présentation à un moment donné trouvent un nom. C’est normal. Je suis toujours un peu brouillon en en parlant.  Le brassage de la peinture se joue entre l’ouverture et la fermeture du monde ? Cela reste métaphorique, large, et pourtant  juste. La couleur la forme ont leur propre pulsion ou plutôt le nom donné à chaque série est en lien direct avec les thématiques car il émane du mouvement intérieur de l’œuvre. Pour une peinture isolée cela peut correspondre à son titre. Pour une suite d’œuvres avec  le même caractère majeur pour chacune, correspondre au nom d’une série. Il est alors important que le titre soit juste. La façon dont la pratique est ici abordée, son lien avec l’existence, le monde, sont donc à l’ origine de la thématique. Petits moyens grands formats, impliquent des approches différentes au support mais alors qu’est-ce qui motive cette attitude face au support. Le geste, le corps, le devenir, la mise en cause de la peinture, les choix effectués consciemment et non, dans le présent de l’action et les influences historiques  me traversent- le corps  dans la gestuelle dans un engagement assez physique avec des grands formats, une relation à l’image avec les  plus petits. L’être méditatif  si je peux dire, la peinture, transpire de longs moments de face à face, sans aucune action physique sur la toile. Océaniques, Ovoïde, Monde figure peinture, Peintures Tigres, Cosmographie. En des termes plus habituels pour la peinture, une circulation s’articule entre une abstraction de type dite informelle, c’est à dire un travail des matières avant (ou après) la figuration et la mise en jeu de la figure.

En 1983 un an après mon inscription à l’école des Beaux –Arts de Cherbourg, j’ ai commencé à affirmer une identité artistique . L’année  suivante je suis allé habiter à Perpignan. Profitant au maximum des ateliers de l’école des Beaux-Arts et des échanges autour de l’ art  je me suis  impliqué entièrement dans une pratique  à travers une série de peintures et de sculptures (sous la dénomination de « c.d :).  Il s’agissait de petites pièces très fragiles, réalisées à partir de petites surfaces de carton peint, collées, juxtaposées et souvent assemblées avec d’autres objets ou matériaux. Seules des photographies peuvent maintenant en rendre compte. Elles sont regroupées sous le titre « les reliques ».

Ayant obtenu le diplôme des Beaux-Arts  j’ai voulu approfondir mes connaissances (ce que je n’ ai pas cessé de faire depuis Cherbourg)  je suis allé à l’Université de Rennes en arts plastiques ( 1987-1988). L’éloignement de l’Université au profit des grands champs théoriques avec la pratique libre et assez expérimentale  de l’art tel qu’il  avait été impulsé à Cherbourg et vécue en Catalogne affirmera ma volonté de me confronter à la matérialité de la peinture, de la sculpture . Je tirerai  profit de cette année en licence d’arts plastiques par la fréquentation de différentes formes de pensées sur l’art en Occident.

En juin 1988 je  retourne à Caen. Je dispose  d’un espace d’environ 20 mètres carrés . Naïvement, pour des raisons matérielles, sans avoir mesuré l’ étendue qui sépare ma pratique d’assemblage et la peinture sur toile, je me fabrique des châssis, achète de la toile et  plonge dans la peinture. C’est une nouvelle période de mise en question. La confrontation à la toile m’a donné l’impression de devoir réapprendre beaucoup de choses. J’aurais dû le savoir. Je conserve de  l’ expérience des années antérieures  un autre rapport  à la forme, à la matière . Quatre années dans ce lieu, les  « peintures-tigres » apparaissent  ainsi que des peintures sans figures précises.

En 1992 je pars  au nord de la ville, continue à peindre, reprend la gravure. 1993, 1994, 1995, 1996, 1997, 1998. Des « formes ovoïdes »  apparaissent. Comment mettre en jeu l’espace pictural avec ces figures élémentaires ? Cette période marque aussi le début des « photos-peintures » (une autre modalité d’approche de l’espace pictural).

Je vais dans un autre atelier en 1998 au centre- ville de Caen, ouvre l’espace Seize –ânes, un lieu de pratique où j’ invite aussi des amis artistes, organise quelques expositions. 2001 correspond au début des peintures « Océaniques ». J’y trouve des problématiques proches de  « c .d : ».

Je déménage encore d’ atelier en  2004. A la suite du contact établi lors d’une exposition avec le peintre sculpteur et graveur Michel Fresnel, en 2006 nous mettons en place  les modalités d’un échange entre dix-neuf artistes de la région sous forme d’une correspondance mensuelle libre, « Nos arts ».  J’ ai besoin d’ être seul dans mon atelier mais aussi de contacts avec d’autres. Cette expérience durera deux ans et demi et sera publiée en deux volumes. Un autre livre sera tiré avec des dessins originaux de chacun  et dix-neuf bois gravés (tirage limité à deux exemplaires).

Ma  rencontre avec la rédaction de la revue « Fusées » en 2009 est importante pour moi, elle a impulsé une nouvelle énergie à ma pratique et la reconnaissance me permet de surmonter plus facilement les obstacles surtout la pression sociale. 13 Peintures-Tigres au format de la revue feront la couverture et l’objet d’ un dossier dans la revue  « Fusées 20 » en 2011.

En 2013 sous l’impulsion de la Fédération de l’estampe, je monte un atelier de gravure, qui sera installé aux ateliers Musée Yvonne Guégan. Ma dernière exposition personnelle date de février 2020 à la Galerie des Sens à Caen et je suis accueilli à IGDA 2 pendant 3 semaines de fin février à mi-mars 2021 ainsi que dans la galerie virtuelle.

DINO FAVA – EXPOSITION “ENCORE”

Les Cosmographies

L’origine des «Cosmographies» se trouve dans une suite de petits formats, à caractère intimiste.

Suite à l’observation d’effet d’érosion sur une photo égarée dans un jardin, j’ai essayé de reproduire le procédé.

Intéressé par l’effet visuel j’ai pioché dans un stock de photos qui ne m’intéressaient plus et je les ai enterrées.

Après quelques jours j’ai déterré les photos altérées et peint à l’huile.

LES OCÉANIQUES

Encore un rapport à la forme et à la couleur à partir duquel va s’explorer un territoire.

Le mouvement de la forme et de la couleur est mis en jeu à travers une procédure particulière où s’opèrent des passages du volume à la surface plane.

Et quand l’environnement est pris en compte on peut parler d’installation.

Il en résulte de grandes toiles ou des photographies.

 Monde figure de peinture

Comme d’ habitude dans le feu de l’action, la première chose observée, c’est l’effet couleur produit par le dernier geste, un carré de 5×5 cm posée sur le dessus de la toile.

De façon conventionnelle un tableau se termine avec une action sensée équilibrer l’ensemble ou du moins, y tendre.

Depuis environ le mois de mai 2020 peindre à l’atelier est de plus en plus compliqué.  Les événements transforment le rapport à la peinture.

Je suis dans un musée, une exposition, une maison, un livre, un rêve à la plage, un écran à l’atelier ?

Ou plutôt une possibilité de tous ces lieux en espèce de  conjonction astrale, une pluie de météores troue la peinture.

Tout cela se passe pour l’ instant dans un salon où se trouve une palette constitué de 12 x 12 couleur  déclinées sur des petites surfaces à proximité des petites toiles accrochés au mur.

Chaque peinture de cette nouvelle série met en situation un effet monde figure de peinture.

Les peintures-tigres

Tigres, série commencée en 1989, sont une métaphore de l’être humain-le rêve aller vers l’intérieur en soi et second en la noblesse de la force-

Les chinois peuvent employer le mot «Peng» pour l’idée d’une énergie en expansion; elle peut être maintenue à l’intérieur de soi.

A travers la figure, le tigre rend propice la couleur.

Formes Ovoïdes

L’oeuf, la forme ovoïde.

La vie intérieure et la vie extérieure s’y regroupent à travers la matière-couleur, en devenir, structure protectrice en laquelle se développe un corps vivant.

Tablette, tabula, tableau.

Retournées les «Figures Ovoïdes» ressemblent aussi à un visage.